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18/01/2010

RESULTAT DE L'ENQETE DU SPEL SUR L'EXPERTISE FAITE PAR LES PSYCHOLOGUES

SPEL (Syndicat des Psychologues en Exercice Libéral)

 

Enquête sur l’expertise psychologique

 

 

En octobre 2000, l’expertise psychologique fait l’objet d’un dossier dans « Le Journal des Psychologues », retraçant l’historique de l’expertise, de sa naissance à son gain d’autonomie par rapport à l’expertise psychiatrique, la tarification étant abordée très pudiquement. Rappelons ici les phases principales :

 

ð En 1945, la proposition d’un psychologue d’adjoindre un examen psychologique aux examens médicaux, est suivie d’effet la même année par l’ordonnance du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante.

ð En 1958, l’article 81 du Code de procédure pénale définit un examen medico psychologique dont la pratique est curieusement confiée à un médecin. Un psychologue, travaillant dans le sillage du médecin hospitalier commis, est alors associé à cette évaluation. S’il n’est pas prévu que le psychologue témoigne le jour du procès d’assises, il y est convié malgré tout le plus souvent à partir de cette date.

ð Il faut attendre 1993 pour que l’expertise psychologique prenne sa totale autonomie, préexistant à l’expertise psychiatrique, voire la préconisant. Mais la rémunération de l’acte psychologique restait fixée par des dispositions datant de 1979, soit 226,80 F. Cette insuffisance manifeste conduit alors le plus souvent les juridictions à aligner la rémunération sur l’expertise médicale, soit 1.125 F. Cette rétribution a été toutefois contestée par certaines Trésoreries Générales.

ð En 1998, le Garde des Sceaux clarifie la situation, demandant aux chefs de juridictions de rémunérer l’expertise psychologique 1.134 F. Cette revalorisation est sensée « … améliorer la qualité du réseau de professionnels concourrant à la justice pénale, sans décourager les meilleurs candidats ».

 

ð En juin 2006, le « Journal des Psychologues » publie à nouveau un dossier « Psychologie et Justice - Parole d’experts ».

 

J’y ai collaboré en ma qualité de vice-présidente du SPEL, avec un article intitulé « Les expertises psychologiques : côté jardin et côté cour ». J’ai ainsi ouvert le sujet sur les expertises judiciaires civiles, demandées depuis 1977 à des psychologues sous l’appellation « Enquêtes sociales », principalement par les Juges aux Affaires Familiales (JAF) et les juges de tutelles, voire par les conseillers de Cour d’Appel.

 

Le « Journal des psychologues » a alors accepté la diffusion d’une enquête du SPEL sur la rémunération des expertises pénales et civiles.

 

 

 

 

Avant d’analyser les résultats de l’enquête, quelques considérations générales sur l’expertise :

 

è La rémunération de l’expertise pénale en 1998, encore en vigueur, de 1.134 F (172,80 €), est acceptable pour un salarié effectuant cette mission hors temps de travail salarié. Si cette rémunération vise à ne pas exclure de l’expertise des psychologues de valeur, on constate, que les psychologues libéraux, astreints avant impôt sur le revenu, à 40 % de charges sur cette rétribution, sont ipso facto exclus de l’expertise pénale. Or, leur diagnostic, loin d’être de moindre valeur que celui de leurs collègues salariés, est assorti de la connaissance des critères de réinsertion sociale et professionnelle.

 

è La rémunération de l’expertise psychiatrique est de 222,95 €. A aucun moment cette disparité de rémunération avec l’expertise psychologique n’est justifiée par l’analyse du temps moyen de chaque pratique.

 

è A la même époque l’expertise graphologique (en identification d’écriture) était rétribuée le plus souvent 3.000 F.

 

è Le tarif de l’expertise civile n’est pas codifié à ce jour, restant le fruit d’une négociation de gré à gré entre l’expert et le mandant, dépendant donc du réalisme économique des deux. La rémunération avancée par le Trésor Public (et depuis 2006 par la Régie du Tribunal) est payée en fait par les parties (ou par l’Etat dans le cadre de l’Aide juridictionnelle). Ces expertises psychosociales civiles sont confiées par les tribunaux tant à des psychologues libéraux qu’à des salariés d’associations (par ailleurs subventionnées par le secteur public), mais aussi à des « psychologues » sans statut professionnel ou à des salariés du secteur éducatif et social, sans mésestimer bon nombre de retraités de la fonction publique, Justice comprise. Cela entraîne des disparités de rémunération évidentes, souvent iniques.

 

 

Le résultat de cette enquête a été très dispersé dans le temps, nombreux étant les psychologues à lire leur documentation avec retard (un an de retard dans la réponse de certains).

 

32 psychologues ont répondu à l’enquête. C’est un rendement très modeste, significatif du peu de cohésion et de l’individualisme de notre profession. La traduction en pourcentage peut donc paraître arbitraire mais permet de cerner une tendance dans les pratiques.

 

 

 

 

 

1 AVEZ-VOUS ETE TENU(E) EN ECHEC PAR LA HIERARCHIE JUDICIAIRE DANS VOTRES SOUHAIT D’INSCRIPTION SUR LA LISTE DES EXPERTS ?

 

Tenus en échec : 3% sans explication aucune de la part du parquet.

Refus du psychologue 6% ne veulent pas être inscrits sur la liste tout en faisant des expertises :

 

Or, 40 % des psychologues faisant des expertises ne sont inscrits sur aucune liste d’experts, pour ne l’avoir jamais demandé, dans une attitude non déclarative.

 

Laisser faire et ne rentrer dans aucun cadre serait-il une tendance du métier ?

 

Situations particulières :

 

- Un psychologue a reçu un formulaire sept mois après en avoir fait la demande au parquet d’une juridiction du sud de la France. Or, une administration est tenue à répondre dans les deux mois à un courrier.

 

- Un psychologue, après avoir rencontré un JAF d’une juridiction de l’Est de la France, n’a reçu aucun mandat, alors que l’entretien avait été ouvert à une collaboration. Mais un an plus tard, le psychologue a été entendu au commissariat de police local par un inspecteur du Renseignement Intérieur (ex RG) de la même ville, pour « enquête de moralité demandée par le Parquet en vue de figurer sur une liste d’experts ». Trois mois après cette audition, le psychologue n’a reçu ni réponse, ni mission.

 

 

2 ETES-VOUS CHARGE(E) D’EXPERTISES PENALES, CIVILES ou LES DEUX ?

 

45 % font exclusivement du pénal

25 % font exclusivement du civil

30 % font les deux types d’expertises

(au civil il s’agit d’enquêtes sociales avec ou sans évaluations psychologiques).

 

3 ETES-VOUS SALARIE(E) ?

 

45% (dont la moitié bénéficient d’une entente avec leur employeur pour utiliser sa logistique : tests, traitement de texte interne, temps de travail, véhicule).

 

4 ETES-VOUS LIBERAL(E) ?

 

10 % (avec déclaration dans le chiffre d’affaires, donc soumis à 40% de charges sociales et difficultés avec la Direction Générale des Impôts pour ne pas être soumis à la TVA).

 

5 AVEZ-VOUS UN STATUT MIXTE (salarié et libéral) ?

 

45 % dont 10 % avouent ne pas déclarer ce revenu dans leur CA et 10% faisant du libéral sans cabinet (donc dans la structure salariée) mais déclarant ce gain à l’URSSAF.

 

6 L’EXPERTISE PENALE :

 

LE TARIF :

 

20% des psychologues n’ont pas répondu à cette question, pourtant essentielle

 

70 % déclarent une rémunération de 172,80 €. Elle est donc dans les normes de la préconisation de 1998, mais on peut s’indigner d’une absence de revalorisation depuis 10 ans.

3 % déclarent une rémunération de 80,00 €

3% demandent un complément pour temps de déplacement

 

LES FRAIS :

 

La majeure partie ne demande aucun complément de frais de trajet.

Quand ils le demandent les indemnisations vont de 0,20 € le km à 0,31 € le km, chiffres reposant peu ou prou sur le barème de remboursement de la fonction publique, ponctuellement mis à jour.

Dactylographie et frais de téléphone ne font le plus souvent l’objet d’aucune demande de défraiement.

 

L’indemnisation pour déposition orale le jour du procès :

 

3 % ne demandent aucun supplément

Pour les autres, l’indemnisation varie de 30,00 à 61,00 €, avec tous les cas de figures entre ces deux extrêmes arbitraires.

 

A signaler le cas d’un collègue ayant effectué au pénal un déplacement de 100 Km que le magistrat a refusé d’indemniser, allant m^me jusqu’à dénoncer la « filouterie » du psychologue.

 

7 L’EXPERTISE CIVILE :

 

9 % travaillent pour une seule juridiction

18 % travaillent pour deux à quatre juridictions

3% travaillent pour plus de cinq juridictions

 

24% acceptent des expertises ou enquêtes sociales toutes destinations (en effet dans les divorces les deux parties sont souvent éloignées l’une de l’autre)

9% n’acceptent pas les déplacements hors de la circonscription

 

Amplitude des rémunérations :

 

La rémunération varie de 80 à 800 €.

Mais dans 10 % des cas la rémunération est identique à celle de l’expertise pénale ; or en matière civile, ce sont les parties qui paient in fine les frais avancés à l’expert par la régie du TGI (sauf en cas d’aide juridictionnelle ou les frais sont à la charge de l’Etat).

A signaler le cas d’une juridiction qui rémunère 38 € de l’heure, sans contestation du nombre d’heures effectuées mais détaillées sur un état. Mais il est vrai que chaque mission représente de 30 à 50 h de travail, déplacements compris.

 

Il arrive au civil que les magistrats demandent le versement par les parties d’une consignation. La Fédération Nationale des Compagnies d’Experts Judiciaires a longuement dénoncé la faiblesse de ces consignations, la difficulté de l’expert à obtenir une consignation plus importante, comme les contentieux pour refus des parties à rétribuer l’écart entre la consignation et la taxation finale.

On a même noté le refus d’un Tribunal d’Instance saisi par un expert psychologue pour non paiement de cette part différentielle par le justiciable ; le psychologue a du demander la cause du refus, et engager une nouvelle procédure s’appuyant sur l’iniquité du refus. L’absence excusée du justiciable le jour du procès a contraint le psychologue à une deuxième comparution. Il a du entamer lui-même par voie d’huissier les recherches de la nouvelle adresse de la personne condamnée. Ce temps complémentaire n’a évidemment pas été pris en compte par le magistrat dans son réquisitoire et le psychologue n’a eu gain de cause que deux ans plus tard.

 

Le plus souvent, ne sont pas indemnisés :

 

  • Les temps de déplacement. Or, aller de NICE à PARIS ou de PARIS à MELUN, quelque soit le mode de déplacement choisi, implique un temps de trajet, hors expertise, qu’il faut bien prendre en considération. Certes, de nombreux magistrats scindent l’enquête sociale en deux, demandant par commission rogatoire la désignation d’un expert dans la juridiction éloignée de la sienne. Cela entraîne des disparités d’appréciation et de synthèse, un expert refusant le plus souvent la concertation avec son confrère qu’il ne connaît pas. Aussi, certains magistrats apprécient l’enquêteur social qui accepte les déplacements et ils rémunèrent le temps de déplacement sur la base de 19 € de l’heure.

 

A signaler le cas d’une juridiction qui compte un supplément pour les déplacements hors département. Mais si le complément fixe est accordé pour aller de GRENOBLE à LYON (100 Km), le même complément est accordé pour aller à LILLE ou STRASBOURG.

 

 

 

  • Les frais de dactylographie et de téléphone :

 

Dans un cas le traitement de texte est facturée et payé 6 € la page, sans que le psychologue ne fasse état du coût des photocopies à fournir en trois exemplaires, en plus de l’original).

 

Dans un autre cas la page de traitement de texte est rémunérée 5,50 € et la copie 0,30 €.

 

Enfin certains magistrats refusent de rémunérer le traitement de texte effectué par l’enquêteur, mais acceptent de rembourser l’appel à un secrétariat extérieur.

 

Faute de justificatif les communications téléphoniques ne sont pas remboursées. Une juridiction accepte un forfait (45 €) et une autre conseille de « compter une ou deux heures de plus ».

 

 

Le kilométrage est indemnisé selon le décret 90-437 du 28 mai 1990 applicable aux agents de la fonction publique.

 

Le barème en vigueur du 24 avril 2006 a été révisé en août 2008, mais ne suit pas en temps réel les écarts du coût du carburant. Il tient compte de la cylindrée du véhicule et du nombre de kilomètres parcourus dans l’année. Le coût va de 0,23 à 0,39 € du Km.

 

Aucune juridiction n’accepte le barème fiscal publié chaque début d’année pour le calcul des frais réels des contribuables.

 

 

8 L’EXPERT AU CIVIL EST-IL EN CONCURRENCE AVEC D’AUTRES PROFESSIONNELS ?

 

33 % n’ont pas répondu à la question

20 % font état de la concurrence des divers travailleurs sociaux, de retraités, voire de professionnels indépendant ni salariés, ni libéraux

20 % pensent ne pas avoir de concurrence

 

9 FACTURATION DES CONSOMMABLES AU PENAL COMME AU CIVIL ?

(notamment tests d’efficience et tests projectifs)

 

4% facturent les consommables sans précision (forfait ou réel ?)

96 % ne facturent pas les consommables.

 

 

 

10 AVEZ-VOUS DU FAIRE APPEL DE TAXATIONS ARBITRAIRES ?

 

10 % ont du faire appel

60 % n’ont pas fait appel

On peut supposer que le différentiel (30%) n’a pas eu le sentiment d’une taxation arbitraire.

 

11 AU CIVIL AVEZ-VOUS ETE CONFRONTE(E) A UNE CONSIGNATION INSUFFISANTE DES PARTIES ?

 

35% des psychologues faisant de l’expertise civile n’ont pas été confrontés à ce problème.

20 % ont connu ce problème (dont un cas où le psychologue a obtenu gain de cause au bout de deux ans de procédure (juridiction Aquitaine) et un cas où il a été confronté à l’inaction totale d’un tribunal francilien malgré plusieurs courriers, y compris auprès du garde des Sceaux.

 

 

12 AVEZ-VOUS ETE DANS L’IMPOSSIBILITE TECHNIQUE DE REPONDRE À DES QUESTIONS POSEES DANS L’ORDONNANCE ?

 

24 % ont été confrontés à ce problème

Reste à savoir si les psychologues en question ont clairement exprimé dans leur rapport ne pas être en mesure de répondre à la question (le plus souvent il s’agit de la question de la responsabilité pénale). Consulter à ce sujet le mémoire de Jean-Pierre BOUCHARD jpbouchard@voila.fr (colloque « La preuve pénale » PARIS Sorbonne 10 novembre 2006 et XXI° Forum des psychologues AVIGNON les 23-26 novembre 2006), sur les missions type confiées aux experts psychologues.

 

13 AVEZ-VOUS DES REUNIONS AVEC LES MAGISTRATS DE LA JURIDICTION VOUS COMMETTANT, ET ABORDEZ-VOUS LES QUESTIONS MATERIELLES ?

 

20 % ont des réunions régulières dont 6% abordent les questions matérielles

40 % n’en ont jamais.

 

Qu’avec une rémunération aussi basse de l’expertise psychologique, seuls 6% abordent ces questions matérielles est tout à fait paradoxal. Pourquoi les psychologues n’osent-ils pas aborder les questions matérielles ?

 

 

Cette enquête, malgré la faiblesse du nombre des répondants, est dans le droit fil de l’analyse effectuée par la Fédération Nationale des Compagnies d’Experts judiciaires (www.cncej.org - cncej@cncej.org; 10, rue du Débarcadère 75852 PARIS CEDEX 17).

Cette Fédération traite de nombreux détails qui n’ont pas été visés par notre enquête : Délai entre présentation des honoraires et paiement - Demande du juge taxateur aux avocats de valider le travail de l’expert avant taxation (on peut se demander de quel droit) - Perte économique en cas de non règlement de l’expertise civile par le justiciable, …).

 

 

Psychologues, nous sommes particulièrement isolés face au pouvoir judiciaire !

 

Nous n’osons pas « ferrailler » avec un magistrat pour faire respecter le juste coût de notre travail. Depuis tant de temps, nous avons été incapables de faire comprendre au pouvoir judiciaire le différentiel pratique entre expertise psychologique et expertise médicale, nous qui consacrons :

 

- de 8 à 16 h à une expertise pénale, voir plus

- de 16 h à 48 heures à une expertise civile, avec des temps de déplacement importants

 

Chacun saura faire l’analyse psychanalytique de notre masochisme économique et sociétal, alors que la psychologie pratiquée par les non psychologues est un véritable business.

 

L’expertise est pourtant un formidable moment d’application de notre métier, tant pour le salarié que pour le psychologue libéral.

 

Le fort pourcentage de salariés et de psychologues mixtes effectuant des expertises psychologiques explique la cause de cette faiblesse de rémunération des expertises. Le salarié (ou retraité) est si content de « faire un peu de gratte », qu’il en oublie sa paupérisation, et son peu de loyauté à l’égard des libéraux.

 

La Société Française de Psychologie Légale est pour le moment le seul organe à avoir tenté de négocier avec l’administration. La dernière documentation reçue de son président à l’occasion de cette enquête, date de septembre 1993 : Je note avec surprise le souhait de cette organisation d’une rémunération de l’expertise psychologique alignée sur le salaire horaire du psychologue 1er échelon de la fonction publique hospitalière (1.050 F en deçà des 172,80 € préconisés par la Chancellerie). De même, pour le président de la SFPL, seul le psychologue hospitalier peut ouvrir à la fonction d’expert psychologue ; cette réduction est inquiétante.

 

En outre l’évocation de l’enquête sociale, véritable expertise civile, est bien évoquée, mais sans autre commentaire que «l’enquête sociale est tarifée sans référence à la qualification de la personne qui les exécute ». Enfin la localisation de la SFPL à l’Université de ROUEN signe sa dépendance sociétale.

 

Sans renier le travail de nos maîtres, il serait temps que notre profession s’affranchisse de l’Université : nous ne pouvons plus laisser parler en notre nom des professeurs qui n’ont ni notre statut, ni notre grille de revenus, et qui ne se privent pas sur le terrain de concurrence déloyale à notre égard. L’enseignant en psychologie n’est pas forcément psychologue et le docteur en psychologie n’est « Psychologue » que sur la base d’une maîtrise ou master en psychologie, ce qui est loin d’être la règle.

 

Les professions non médicales ne voient pas leurs honoraires d’expert tarifés.

 

Les ordres professionnels sont alors assez puissants pour préconiser et négocier un prix moyen à la fois protecteur et garant de qualité.

 

Accepter la tarification de nos expertises psychologiques, c’est se situer ipso facto dans le sillage médical et paramédical (qui est, de plus, protégé par une instance ordinale). Nous ne le sommes pas.

 

La défense de l’expertise psychologique judiciaire, comme l’image de notre profession à ce jour bien mise à mal, ne peut relever que de tous les psychologues. Deux de nos syndicats sont unis sur la nécessité d’avoir un ordre professionnel (SNP et SPEL - Journée à l’Université Victor Segalen à BORDEAUX le 29 novembre 2008).

 

Un « Ordre des Psychologues », en ayant ainsi la possibilité de rétribuer un « Secrétaire Général » se donnerait les moyens d’avoir un interlocuteur permanent auprès de la chancellerie, auprès des grands organes de presse, auprès de l’Europe : ce serait une veille professionnelle oeuvrant pour la dignité de la profession.

 

Ce serait en outre la seule façon de nous affranchir et de l’Université et du monde médical, qui nous limitent, notamment dans le judiciaire, à des « émoluments de femme de ménage » (sic).

 

Cette enquête, malgré la pauvreté de son résultat, montre qu’individuellement nous sommes malhabiles et sans voix pour défendre une juste rémunération face à des fonctionnaires indifférents.

 

Le côté « paillette » de l’expertise semble suffire à certains. C’est ignorer les fortes promotions d’étudiants en psychologie séduits par le discours universitaire mais qui devront bien s’insérer économiquement dans la société.

 

 

 

Marie-Ange HELIE

 

 

ACTUALISATION

 

 

Un décret n°2009-285 du 12 mars 2009, relatif aux enquêteurs sociaux et à la tarification des enquêtes sociales en matière civile, a des conséquences contradictoires :

 

Il établit pour cinq ans dans chaque cour d’appel une « Liste des enquêteurs sociaux » à laquelle peuvent postuler les personnes « exerçant ou ayant exercé pendant un temps suffisant une profession ou une activité, notamment dans le domaine social ou psychologique, en relation avec l’objet des enquêtes sociales ».

 

Ce texte écarte les établissements et services habilités par la protection judiciaire de la jeunesse pour l’exercice de mesures d’investigations en assistance éducative.

 

Il y aurait donc un souci de professionnalisation des intervenants, même si les retraités et salariés ne sont pas écartés, et constituent une concurrence déloyale pour les psychologues en exercice libéral. Le statut d’auto entrepreneur ne fait que développer cette disparité.

 

Cette mesure serait positive, même si on peut s’étonner que dix mois plus tard de nombreuses cours d’appel n’aient pas encore publié leur liste.

 

Ce décret a, en revanche, un effet négatif en son chapitre II relatif à la tarification des enquêtes sociales. Celle-ci est précisée par un arrêté du 12 mars 2009 qui fixe un tarif forfaitaire de 500 €.

 

Cette notion de « forfait » est totalement arbitraire car chaque dossier est un cas particulier. Comment peut-on envisager de rémunérer sur la même base l’enquête portant sur un couple avec enfant, séparé dans la même ville,et deux familles recomposées avec quatre enfants résidant dans deux villes, parfois distantes de plusieurs centaines de kilomètres. En effet, le texte ne prévoit aucune rémunération des temps de déplacement.

 

Le tarif de 500 € est une régression par rapport aux rémunérations fixées par chaque cour d’appel, dont la plus restrictive à notre connaissance, pratiquait un « forfait » de 700 € (et 800 € avec déplacement, quelle que soit la distance !).

 

Le tarif de 500 € est irréaliste. Une étude portant sur 22 enquêtes sociales ordonnées par le même tribunal, compte tenu des charges sociales inhérentes à l’exercice libéral, ramènerait la rémunération horaire de 20 à 9 €.

 

 

Comparativement le Conseil national des barreaux demande pour un divorce simple par consentement mutuel, sans enfants, un barème de 800 € par conjoint, et 1.000 € à Paris. Il est vrai que les avocats ont un ordre, et quoiqu’ils en disent sont friands d’aides juridictionnelles et d’interventions dans les locaux de garde à vue.

 

On peut donc s’interroger sur le caractère égalitaire de notre République, et le sens des réalités des hauts fonctionnaires et magistrats de la Chancellerie.

 

En effet, les tribunaux administratifs, en matière de rémunération des commissaires enquêteurs, dans le cadre d’enquêtes publiques, appliquent le décret n°2002-1341 du 5 novembre 2002 fixant à 38,10 € de l’heure sa rémunération, avec prise en compte des temps de rédaction. Or, 80% des commissaires enquêteurs sont des retraités de la haute fonction publique qui, par ce biais, occupent leurs loisirs et arrondissent leur confortable retraite.

 

En conclusion, plus une enquête sociale sera simple, sans déplacements, avec un temps de rédaction minimum et une économie de papier et d’encre d’imprimante, mieux elle sera rémunérée !

 

Une législation irréaliste s’expose à des détournements et à une médiocrité organisée des prestataires et des prestations.

 

 

 

 

DROIT DE REPONSE A FRANCE INTER

DROIT DE RÉPONSE
de Mireille BOUSKELA
Présidente du Syndicat des Psychologues en Exercice Libéral -SPEL
à
Madame Laurence LURET

Madame,

La simpliste voire archaïque définition  des Psychologues que M. Jean-Michel BESNIER, Philosophe et Enseignant à l’Université de la Sorbonne, a faite au cours votre émission Parenthèse le 12 décembre 2009, est fausse et inacceptable de la part d’un Enseignant Universitaire. Elle discrédite l’ensemble des Psychologues et désinforme les personnes qui les consultent.
En effet, Monsieur BESNIER a déclaré pour argumenter son propos au sujet des progrès de la robotique (1): « Du point de vue de ma discipline, qui est la philosophie, depuis des siècles le philosophe essaye de se poser la question ; qu’est-ce qu’avoir une vie intérieure, une petite musique intérieure ; qu’est-ce qui me prouve que vous avez une petite musique intérieure dans votre tête ? Je sais que j’en ai une et que vous en avez-vous aussi, mais en toute rigueur c’est extrêmement difficile de la tester. On a vu au cours du 20ème siècle des Psychologues tirer une conclusion rapide en disant puisqu’on ne sait pas ce qu’est la vie intérieur, ne nous occupons pas de ce qu’est la vie intérieure. Et la Psychologie c’est  simplement l’aptitude à observer que dans certaines circonstances nous adoptons tel ou tel comportement. » Et Monsieur BESNIER d’insister : « Donc, juste on observe des comportements dans certaines situations».

Monsieur BESNIER semble ignorer que la conscience (donc le subjectif) et par conséquent l’inconscient est la préoccupation majeure des psychologues praticiens chercheurs, que nous sommes,  et ce, depuis le début de la discipline existe, laquelle par ailleurs prit son essence, dans la philosophie.  Nombre de psychologues sont également diplômés de philosophie.

Je  choisis parmi toute la littérature du 20ème siècle relative à notre discipline, de citer le livre de Maurice REUCHLIN, Professeur de Psychologie et éminent collègue de M. BESNIER, qui enseigna dans la même  Université, René- Descartes Science humaines-Sorbonne. Cet ouvrage  intitulé « PSYCHOLOGIE », PUF 6e édition revue et corrigée : 1986,( 1re édition : 1977) est une des  références des étudiants en matière de Psychologie.
Nous pouvons y lire que  la conscience est une prise de position de la psychologie  contemporaine à l’égard de la subjectivité ;  qu’elle permet de comprendre ; que l’évolution de la psychologie scientifique à l’égard de la conscience apparaît lorsqu’on compare les textes de H. Piéron ,1908 relatifs à la conscience de J. Piaget, 1974 relatifs à la prise de conscience dans la conduite ;  que la psychologie évolue au cours des recherches, (bien évidemment ! )

Les psychologues contemporains s’inscrivent comme des chercheurs de terrains. Dire qu’ils pensent au quotidien leur profession parce qu’ils sont impliqués directement dans l’évolution constante des personnes et de leur société va de soi.

Aujourd’hui les psychologues définissent leur activité comme relative à la complexité psychique de l’humain et du sujet dans sa personnalité, sa singularité, sa vie intrapsychique et  son intériorité au sein d’une société en mouvance.

Le Titre de Psychologue sanctionné par le Master de psychologie, est protégé par la loi n°85-772 du 25 juillet 1985.

Dans l’exercice de son activité, le Psychologue tient compte de la personne dans sa globalité et dans tous les aspects de sa vie en tant que sujet humain respectable et respecté. Il est le spécialiste et le généraliste de la vie psychique, en référence au titre unique de Psychologue.

Ce travail avec la vie psychique mobilise le langage, la parole les mécanismes psycho-dynamiques fondamentaux conscients, préconscient, inconscients.

L’exercice et la pratique du Psychologue se réfèrent au champ de la Psychologie, dans une approche de type scientifique propre aux Sciences Humaines enseignées à l’Université en son socle rationnel et fondamental nommé « la Psychologie ». Ce savoir global réunit l’ensemble des connaissances qui composent la discipline de « La Psychologie » et la diversité de ses champs d’application.

L’exercice du psychologue s’inscrit dans une dimension de  recherche permanente.

Les compétences du Psychologue en sa qualité de spécialiste de la vie psychique se situent dans le domaine de la relation, de la communication, de la construction de l’identité de la personne humaine et de son autonomie fondamentale dans sa vérité subjective.

La mission d’intervention du Psychologue est en permanence à plusieurs niveaux logiques de communication et d’écoute clinique :
-  la communication ordinaire, intercommunication (ou communication avec l’autre),
- la subjectivité, le non observable, c’est-à-dire la prise en compte du champ de pensée de l’autre, dans sa singularité 
– l’intersubjectivité,  ou l’espace d’interaction entre les différents éléments de pensées, conscients et inconscients. C’est ce qui permet au psychologue d’entendre un autre discours : le manifeste ; ce qui est donné à voir et à entendre dans la communication ordinaire, la réalité, le motif de consultation, recueils spontanés du discours, et le latent ; ce qui n’est pas donné directement à voir et à entendre. Ce que l’on peut entendre dans un deuxième plan.

Les psychologues ont une démarche rigoureuse vis-à-vis de la question du conscient et de l’inconscient grâce à la méthode clinique et à  celle des tests de personnalité.

Voici une présentation synthétique de notre exercice professionnel au quotidien.

Nous nous demandons la raison pour laquelle ce Philosophe Enseignant a relégué le Psychologue à une mission simplement opératoire dénuée de tous les savoirs fondamentaux

Et vous prions, Madame, de bien vouloir communiquer ces rectifications au cours de votre prochaine émission. Il en va de la qualité de l’information de votre émission, laquelle est largement écoutée.

Vous en remerciant par avance,

Je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes sentiments distingués.


06/11/2009

CHACUN CHERCHE SON PSY

CHACUN CHERCHE SON PSY

 

La Foire au « psy », bat son plein. Mettre du service psy à toutes les sauces pour cacher la misère, est la dernière mode en entreprise. Pourtant, tapi derrière cette lénifiante abréviation, le danger guette sa proie. La personne en souffrance psychologique est exposée au business « psy », véritable zone de non droit. France Inter n’a-t-elle pas déclaré en 2009 au cours d’une de ses revues de presse, que la crise n’était pas pour tous et que les psychologues « tiraient leur épingle du jeu » ? Alors business is business, tout fait ventre pour le « psy » autoproclamé en quête de gain. La banalité moderne du mal prend d’autres visages avec cette tromperie sémantique racoleuse, productrice de confusions : qui est qui ? Qui fait quoi ?

 

Les suicides en entreprise, médiatisés par vague, rappellent le triste chao dans lequel nos concitoyens sont plongés vis-à-vis des centres d’appels psychologiques où les écoutants ne sont pas toujours des psychologues.

Ainsi, dans une certaine entreprise malade, l’écoute des salariés ne serait pas confiée à des psychologues externes, mais à des responsables hiérarchiques : le salarié en souffrance se trouve ainsi face à son chef pour évoquer ses problèmes. Le piège se referme sur l’esprit, dernier espace de liberté que le salarié possède sur son lieu de travail. Viol de l’intime sans agression visible, et enfermement au sein d’une apparente démocratie, au risque de la dépression, de la folie ou du suicide.

Parallèlement, le management des salariés est confié à des coachs qui, forts de leurs théories psychologiques vulgarisées (quand ce n’est pas de l’ésotérisme) promettent aux employeurs en mal de performance, des lendemains qui chantent, dans le sens d’un accroissement de leurs chiffres d’affaires.

Les conséquences dramatiques de ces fonctionnements pervers étaient prévisibles. Les salariés sont stressés, pressés comme des citrons, déstabilisés, n’ont plus l’esprit d’équipe, se méfient les uns des autres, détestent leur hiérarchie, bref sont malheureux au travail et avalent quantités de psychotropes pour se consoler. La fortune des laboratoires pharmaceutiques se porte bien, et la sécurité sociale sert à quelque chose.

Alors que notre système ultra libéral laisse proliférer le marché sauvage de la psychologie vulgarisée pratiquée par les consultants auto-proclamés les plus divers, curieusement les psychologues, diplômés de l’université, ne trouvent un emploi ou créent une cliscientèle en cabinet privé qu’avec difficulté. Il en va de la différence des approches. Le cliscient* attend du magique ; les marchands d’illusion font du commerce ; le Psychologue universitaire exerce sa profession libérale avec rigueur, éthique et déontologie. Il faut dire aussi que l’université s’est dérégulée en commercialisant à tout public des enseignements de psychologie parcellaires et non académiques. Le business se trouve parfois là où on l’attend le moins.

 

Ici, nous soulevons une question politique majeure. Allons nous vers un système producteur d’aliénation mentale collective de masse, pour obtenir une docilité des salariés en vue de toujours plus de productivité ? Les pouvoirs publiques laisseront-ils faire ou seront-ils impuissants car dominés par le commerce et la finance mondiale ? Les responsables d’entreprise se réveilleront-ils de leurs rêves de toute puissance, ou se perfectionneront-ils dans la déshumanisation au travail, grâce aux conseils minutieux de coachs choisis pour leurs méthodes transformatrices d’humains en morts vivants ?

Alors « psys », à vos marques ! Partez !

 

Marie-Ange HÉLIE, Vice Présidente du SPEL

Mireille BOUSKÉLA, Présidente du SPEL

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*Le cliscient : - le particulier s’adressant au psychologue n’est pas un client (dont le sens a été détourné au profit commercial). Il n’est pas non plus un patient (dont le sens renvoie à « passif » et au médical. En effet, le demandeur de ce type d’intervention n’est jamais passif, sinon il n’y aurait aucun résultat). Ce demandeur est l’acteur de son propre changement, dans la mesure où il cherche à se connaître lui-même.

De ce fait il convient de proposer un néologisme, tel que cliscient, revenant à la racine étymologique de « cliens, cliensis » et sciens « celui qui sait ».