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21/11/2007

POURQUOI UN ORDRE PROFESSIONNEL DES PSYCHOLOGUES

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La création d’un Ordre professionnel des psychologues constitue l’aboutissement logique de la définition formelle de la profession établie par la loi du 25 juillet 1985. Réglementant l’usage du titre de psychologue, cette loi visait déjà, il y a près de vingt-deux ans, à lutter en contrepoint contre une permissivité quant à la nature de la thérapeutique adoptée par le praticien, et, ce faisant, à s’inscrire en faux contre une pratique sauvage de la psychologie et de ses détournements par la pratique dite de « psychothérapie ».

Or, aujourd’hui, rien n’est réglé. Loin s’en faut

Puisque nous assistons à une usurpation du titre de psychologue en fait et, si nous ne faisons rien, en droit ! En effet, tout est ainsi pensé pour que l’usager ne puisse faire le départ entre la profession de psychologue, dont l’usage est réglementé, et l’activité de « psychothérapeute », dont l’exercice obéit à des règles et pratiques obscures qui ne sont pas objectivement remises en cause par l’intervention des pouvoirs législatif et réglementaire.

Onde de choc et de dérégulation certes, mais que seul, un Ordre national puis européen sera à même d’enrayer.

Un Ordre qui passera par la réglementation de l’Exercice, des Actes de compétences et un Code de déontologie commun (quel que soit le mode d’exercice des psychologues : public, libéral ou associatif), et ce, sous l’égide de normes européennes contraignantes et/ou de recommandations. En effet, un Ordre professionnel représente une instance disciplinaire qui, d’une part, renforce la qualité des professionnels en exigeant formellement de leur part le respect des principes de moralité, de probité, de compétence et de dévouement indispensables à l’exercice de la psychologie, et, d’autre part, protège l’usager de l’exercice sauvage de la psychologie et de l’utilisation abusive du terme « psychologie ».

C’est dans cet esprit que s’est créé le Syndicat des Psychologues en Exercice Libéral (SPEL), en 2003.

Son but était de répondre à la demande spécifique des psychologues libéraux, là où ces derniers avaient largement pressenti le danger, mais ceci, dans l’indifférence (quasi-)générale de leurs collègues institutionnels. En effet, les psychologues libéraux étaient et demeurent les premiers en ligne à subir, depuis une vingtaine d’années, la concurrence illégale et déloyale de pseudo-professionnels libéraux qui s’autoproclament habilités à exercer des soins de psychothérapie. Ceux-là mêmes qui persistent, aujourd’hui, à cultiver insidieusement et massivement l’amalgame entre l’activité de « psychothérapeute » (dont l’identité normative, au demeurant, reste toujours aussi floue) et le Titre de psychologue. Et ce, pour capter une « clientèle » en déficit de clarté dans l’offre de soins.

Ainsi et plus que jamais, l’exercice du psychologue libéral se trouve confronté au développement incontrôlé du marché du « bien-être ». Ce marché fait son terreau de toutes ces pratiques vouées à une marchandisation du psychisme humain, véhiculée par l’idéologie nauséabonde du « Tout-Psy » et de pseudo-techniques de soin (450 techniques répertoriées sur ce marché) et soutenue par un lobbying puissant, hautement organisé et aux ramifications nombreuses, jusque dans la Presse et dans l’Edition.

Or, il est certain que ces medias particuliers ne s’affranchissent que malaisément de leur partialité (malgré l’affichage de leur numéro de Commission Paritaire Presse), puisque leur rôle consiste à communiquer avant tout un message prédéterminé en amont, dans le domaine de la Psychologie. Mais, autant dire qu’il s’agit de la lutte du pot de terre contre le pot de fer, lutte au sein de laquelle, seul, un Ordre professionnel peut jouer le rôle d’arbitre et remettre de l’ordre symbolique.
En cet état de dérégulation et en l’absence d’autorité supérieure fondée, la défense et la promotion de l’exercice libéral des psychologues exigeait, pour le SPEL, de mettre au grand jour et de dénoncer cette situation de concurrence sauvage, éminemment dangereuse pour la santé du public. Une telle situation de concurrence abusive ne conduit qu’à tromper les usagers, en situation de fragilité psychique plus ou moins importante, en les exposant délibérément à des pratiques dangereuses, voire à des manipulations ou des confusions aliénantes de type sectaire. Ce que nous avons fait.

OUI, le SPEL affirme que l’EXERCICE ILLEGAL DE LA PSYCHOLOGIE EXISTE. Puisqu’il est pratiqué et banalisé par l’explosion d’un envahissement de « peutes » en tous genres, conséquence de la marchandisation de l’humain et de son esprit.

OUI, le SPEL affirme que, seul, un Ordre professionnel peut se porter garant de l’intérêt général en matière de Santé publique, là où il s’agit de proposer des repères symboliques porteurs de modification ou de réparation à l’égard des problématiques, souffrances ou dysfonctionnements, qu’ils soient d’ordre moral, psychique ou psycho-social. La spécificité du psychologue libéral étant d’œuvrer au cœur de la société civile, le plus en amont possible, ce à visée de prévenir l’aggravation des troubles et de réduire leur entrée dans l’instrumentalisation de la souffrance humaine, via leur stigmatisation par la médecine du corps, la psychiatrie ou l’orientation institutionnelle : autant de signes de l’enfermement psychique.

Cette plaidoirie pour l’exigence d’un Ordre professionnel tient - de la part des psychologues libéraux qui exercent environ à 20%, pour 8O% de psychologues institutionnels – aux principes suivants : leur statut leur confère autonomie constructive, mais isolement – liberté précieuse, mais exposition quotidienne à des risques financiers – responsabilité prenant appui sur une éthique et une déontologie validée par notre diplôme universitaire de haut niveau en savoir fondamental théorique et pratique, mais sans protection par un cadre juridique adapté. En cas de plaintes, nous relevons du Droit commun. Ce qui signifie que nous sommes responsables civilement et pénalement. A ce titre, notre responsabilité peut aisément être incriminée devant les tribunaux. Or, qui a compétence pour déterminer les éventuels manquements des psychologues à leurs obligations professionnelles si ce n’est la profession elle- même et donc un Ordre investi d’un pouvoir disciplinaire ? En l’absence de cette instance et donc de sanctions ordinales, le code de déontologie est réduit à une déclaration de principes, et, hors les cas d’infractions pénales, les contrevenants aux principes qu’il contient peuvent exercer en toute impunité. Bien entendu, les syndicats ne sont pas suffisamment armés pour assurer cette police ordinale, et ce, pour plusieurs raisons, mais dont la plus évidente est la suivante : il n’y a pas d’adhésion obligatoire, et la seule sanction qui peut être prononcée est dès lors l’exclusion du syndicat.

Le monopole exercé par l’ordre sur les professions et le caractère obligatoire d’adhésion à celui-ci sont, dès lors, les conditions sine qua non pour le maintien d’une réelle discipline dans une profession comprenant des aspects libéraux et, subséquemment, une protection satisfaisante des intérêts de l’usager dans l’esprit de la loi de 1985.

De même, le statut libéral, en tant qu’exercice, contrairement aux idées reçues, ne dispose pas en France de définition juridique, contrairement aux statuts des salariés qui restent protégés par le cadre institutionnel auquel ils se trouvent juridiquement référés. Ici, le besoin d’un rempart institutionnel est criant, besoin auquel pourrait répondre un Ordre professionnel. Devant ce manque de définition légale française du statut libéral, les professions réglementées et à Ordre (avocats – experts-comptables – architectes – vétérinaires…) se battent à Bruxelles, car c’est le lieu décisionnaire des futures grands principes qui réglementeront l’exercice libéral. Seule Bruxelles peut donner une vraie impulsion à la recherche et à la détermination d’un statut légal à l’exercice libéral.

Pour ce faire, ces professions à Ordre mandatent un représentant qualifié et permanent, qui est rémunéré à la hauteur de son travail et indemnisé pour ses pertes ressources. Nous pouvons prendre pour exemple l’Ordre des psychologues italien dont le Président siège au Céplis à Bruxelles et ne peut le faire que parce qu’il est rémunéré et indemnisé pour ses fonctions et déplacements européens. A côté nos syndicats de psychologues français, pauvres en adhérents, donc en moyens financiers font pâle figure, et ne comptent que sur la seule bonne volonté de ceux qui les représentent au nom de toute la profession. Il est évident qu’un psychologue français exerçant en libéral, à temps complet, ne peut se priver de ressources financières de son travail pour défendre la profession. Dans ce monde où l’influence et le lobbying règnent en maître, il faut être réactif et doublement présents, parce que les décisions se prennent vite. Il est absolument nécessaire de déléguer des représentants tutélaires pour être constamment présents à toutes les décisions nous concernant. Cela implique évidemment de rémunérer ces représentants. Et seul un Ordre de part ses cotisations obligatoires peut répondre à cette exigence.

Il est nécessaire de préciser encore une fois que la profession de psychologue s’avère être dans une situation paradoxale car son titre est réglementé depuis la loi de 1985, mais son exercice ne l’est pas. Tout le monde ne peut pas s’intituler « psychologue », mais tout le monde peut faire « de la psychologie » : notamment, les « peutes », les consultants, les formateurs, les magazines. Et qui ou quoi d’autre encore … ? Nous, psychologues, avons eu tord de nous reposer sur notre diplôme (et nos diplômes universitaires antérieurs qui peuvent nous mener de dix à douze années de formation universitaire), croyant que ceux-ci nous protègeraient. Mais les temps ont changé. Le respect du savoir de haut niveau et de ceux qui l’ont acquis avec moult efforts se voit dominé par des enjeux économiques et des pressions de tous bords qui vont jusqu’à déborder les pouvoirs publics. Ces derniers en viennent alors à légiférer tous azimuts. Nous en voulant pour preuve le dernier projet de décret venant en application de l’article 52 de la loi de Santé publique d’août 2004 réglementant le titre de psychothérapeute. Ce projet constitue une discrimination sans précédent de notre profession et un démantèlement de la valeur des diplômes universitaires, aux allures de forfaiture. Ce ne pourrait être qu’un début, vers le pire. Ici encore, est criant le besoin d’un rempart contre l’exposition à la déqualification de notre diplôme et de notre profession, quand l’Etat peut céder à la pression de lobbyings capables de forcer la loi, sous prétexte que des pseudo-psychothérapeutes se sont imposés sur le marché libéral et la place publique en ouvrant leurs échoppes : comme s’ils pouvaient faire loi à la place de la loi, en anticipant la loi, c'est-à-dire sur le mode pervers.

Ce rempart contre ces dérives, le SPEL a tenté de le dresser depuis le premier projet de décret, en tirant la sonnette d’alarme et en brisant certains tabous (cf. article du SPEL in Le Journal des Psychologues n° 246 (avril 2007) p.6, intitulé « La fin des psychologues cliniciens ? »). En effet, notre syndicat professionnel a dû s’inscrire en faux, ce à un double titre : d’une part, contre l’abus du dernier gouvernement consistant à permettre un accès direct à l’enseignement d’un pseudo-master de psychopathologie, sans pour autant avoir accompli les années précédentes en psychologie (LI, L2, L3, M1, anciennement DEUG, Licence, Maîtrise de Psychologie) pour quelques centaines d’heures. D’autre part, contre la majeure partie organisations de psychologues qui étaient prêtes à cautionner la création d’un doublon du Master de Psychologie taillé sur mesure et déguisé en un faux Master de Psychopathologie. Ce afin de légitimer, finalement, tout ce qui existe en termes de « peutes » sur le marché, au détriment des repères civilisateurs inclus dans la science psychologique et le Titre de psychologue, et au détriment de l’intérêt général. Aujourd’hui encore, nous devons lutter contre le principe d’une formation quasi indigente, débouchant sur un pseudo-diplôme de psychothérapeute acheté au prix fort dans des instituts privés, c'est-à-dire dans un monde totalement déréglementé et uniquement marchand. Seul, un Ordre professionnel sera en mesure de faire barrage à de telles dérives et à une telle régression depuis 1985. C'est-à-dire là où notre profession n’a pas continué son élan, faute de la protection juridique de son Exercice, de ses Actes de compétence et de son Code de déontologie, en lien désormais avec la réglementation européenne.

LA MOBLISATION DE TOUS LES PSYCHOLOGUES EST URGENTE POUR PARTICIPER A ETABLIR UN ORDRE PROFESSIONNEL.

D’une part, pour qu’un Ordre professionnel redonne à notre profession une identité intellectuelle forte, dont les membres soient publiquement reconnus comme des spécialistes et des experts, dont la formation continue obligatoire intègre la recherche fondamentale, dont la dynamique procure espoir aux jeunes psychologues, confrontés actuellement au chômage.

D’autre part, pour que cet Ordre redonne à un public perdu ou en errance des repères symboliques lisibles qui lui permettront, quant à ses interlocuteurs, de distinguer le bon grain de l’ivraie. Cet Ordre doit, expressément, se porter garant des exigences cardinales de Santé publique, face à l’utilisation illégale de l’exercice et des termes inhérents à la science psychologique (le dit « psychologie » ou « psychologies » ou « psychologique»), afin que ces termes spécifiques soient non décomposables ou composables avec d’autres qualificatifs, sans rapport avec la science psychologique. Face aussi à l’exposition de l’usager aux dangers des mauvaises pratiques, des pratiques sauvages de la méconnaissance et des dérives sectaires : autant de symptômes qui s’avèrent dorénavant installés par permissivité, c’est à dire sans légitimité, et qui constituent un authentique danger en termes de Santé publique.

Enfin, parce ce futur Ordre professionnel des psychologues sera certes, formé de personnes morales de droit privé, mais investies par le législateur de certaines prérogatives de puissance publique, leur permettant d’accomplir la mission de service public qui leur est confiée.
Pour sa part, le SPEL s’est préparé à la mise en place de l’Ordre professionnel. Il a rédigé son propre Code de déontologie et d’éthique pour l’exercice libéral, en lien avec le Code de déontologie européen. Il a rédigé ses propres Actes de compétences, pour l’exercice libéral. Il s’est doté d’un Conseil, en l’espèce, d’un Avocat à la Cour de Paris, spécialisé en Droit public : Maître Bruno BASSET. Cet avocat a multiplié son assistance pour nous, y compris lors des discussions du SPEL au Ministère de la Santé, où il nous a accompagné en personne, pour la lutte contre l’article 52 du projet de décret visant à l’établissement du titre de psychothérapeute. Le SPEL, seul, a pris en charge le paiement de ses actes et interventions.

Mireille BOUSKELA, Présidente du SPEL
Catherine BESSON, Présidente de la commission Déontologie du SPEL
Antoine SPATH, administrateur du SPEL


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Le rapport de Maître BASSET pour le SPEL sur les conditions de compréhension et de mise en œuvre d’un Ordre professionnel des Psychologues inclut les conditions suivantes :
Un ordre professionnel est la réunion d’un droit matériel de juridicisation d’un code de déontologie et d’un droit institutionnel (l’agencement structurel permettant de faire respecter les normes contenues dans le code de déontologie).

1 – L’instrument législatif, comme condition procédurale à la création d’un ordre professionnel
2 – La nature juridique d’un ordre professionnel
3 – La nécessité de donner une valeur juridique au Code de déontologie des psychologues
4 – La constitution d’une structure disciplinaire apte à assurer le respect des normes contenues dans le Code de déontologie